RECTOVERSION, AN 10 DE L'AN 10.000

LE JOURNAL

numéro 6 - mai 2005

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Sur la condition humaine
et son devenir*
par Philippe Contal

En 52 avant Jésus-Christ, César s'empare d'Avaricum après 25 jours de siège et massacre la population.

Vers l'an 1 de notre ère, Hérode se sentant abusé par les mages, envoie ses troupes massacrer tous les enfants de deux ans et moins, demeurant à Bethléem et dans son royaume. Le Nouveau Testament nous le présente comme le "massacre des innocents".

Vers 780, Charlemagne donne l'ordre de massacrer des milliers de saxons, afin de marquer la conquête de la Saxe.

Le 15 juillet 1099, les croisés prennent Jérusalem en massacrant la population.

En juillet 1209, la totalité de la population de Béziers est exterminée. C'est le début de la Croisade albigeoise.

Dans la nuit du 23 au 24 août 1572, les protestants, réunis à Paris pour le mariage de leur chef Henri de Navarre avec Marguerite de Valois, sont massacrés. L'histoire retiendra cette date sous le nom de "massacre de la Saint-Barthélemy".

Le 9 juillet 1860, les chrétiens maronites de Damas sont exterminés dans la nuit avec la complicité du gouverneur turc de Syrie.

Pendant les 6 semaines qui suivirent le 13 décembre 1937, les japonais exterminèrent près de 300 000 chinois. Le massacre de Nankin figure parmi les plus sanglants épisodes de la seconde guerre sino-japonaise.

Le 10 juin 1944, la totalité des habitants d'Oradour-sur-Glane, un petit village près de Limoges est exterminée par les SS.

Encore plus proche de nous, le 11 septembre 2001 à New-York, le 3 septembre 2004, le massacre de Beslan, en Russie...

Et ce ne sont que quelques exemples (1) de ce dont l'homme est capable de faire pour des raisons qu'il semble bien être le seul à comprendre ! Le sens de l'histoire nous donne-t-il réellement le droit de juger nos ancêtres comme des barbares ? Avons-nous réellement des leçons à donner à ceux pour qui la violence est le principal mode d'expression, voire le seul ?

Suivant régulièrement l'actualité, je reste ébahi devant la facilité avec laquelle les informations se remplacent elles-mêmes, dans un mouvement incessant où l'obsolescence semble être antérieure à la parution des informations. Le sombre anniversaire d'Auschwitz a fait oublier le Tsunami. Il a lui-même très vite été remplacé par la mascarade de la Corée du Nord dont on ne parle plus guère aujourd'hui. Si la vie est le mouvement, il me semble que l'excès de mouvement est synonyme de perte de repères.

Cette perte de repères se manifeste à tous les niveaux. La pratique religieuse qui fait place à une forme d'automédication spirituelle, les courants politiques dont les projets ne sont plus guère porteurs de sens, l'économie galopante qui transfère une grande partie de la production manufacturière dans les pays disposant de conditions sociales déplorables... Comme la "liste" des massacres et autres témoignages de notre proximité avec ce que nous nommons les hommes préhistoriques, la liste des repères qui se désagrègent est bien loin d'être exhaustive.

Alors face à tout cela, que pouvons-nous faire réellement ? Devons-nous suivre l'idée chère aux cathares comme quoi Dieu n'est pas de ce monde, avec son corollaire : l'enfer, c'est le monde et la vie terrestre ?

Dans une philosophie du concret, nous ne pouvons nier ce côté sombre de notre être. Rejeter systématiquement la faute sur l'autre revient à nous mentir à nous-mêmes. Mais sommes-nous prêts à assumer notre part de responsabilité dans toutes ces horreurs ? Car si il est facile de lister ce que l'histoire nous rapporte, avons-nous réellement conscience du fait que nous construisons aujourd'hui une séquence d'histoire pour nos enfants ?

Face à cette problématique, j'avoue être incapable de changer le monde. Je me dois donc de centrer mon énergie sur ce qui est à ma portée. Mais en y regardant bien, le champ de travail (2) est immense. Car le propre de mon exposé sans prétention est de suivre le chemin inverse de celui préconisé par Pascal Engel : "la philosophie d'aujourd'hui doit passer par le local avant d'atteindre le global". Finalement, nous devrions, en toute humilité, passer d'un mode à l'autre. Admettre notre modeste place au sein de l'Univers pour agir sur notre environnement direct. Être actif au quotidien pour s'inscrire dans un plan plus ambitieux, celui de l'Humanité. Le changement d'échelle de nos pensées peut produire un effet bénéfique quant à notre compréhension des enjeux qui se présentent à nous aujourd'hui.

Et donc... que les cathares aient tort ou raison quant au fait de considérer le monde terrestre comme l'œuvre du mal, force nous est de vivre dans cet environnement et d'y tenir le mieux que nous pouvons notre place, d'y apporter le plus de valeur ajoutée possible, qu'elle se traduise sous forme d'amour, de relations ou de réalisations.

Nous ne pouvons nier notre condition humaine, mais nous pouvons en modeler le devenir.

A bientôt.

© Philippe Contal

(1) L'encyclopédie Wikipedia dispose même d'un chapitre "Liste des massacres" :
(2) et non pas "camp de travail"...

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* La Lettre du Héraut des Terres Cathares - n° 2005/2 - février 2005

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