RECTOVERSION, AN 10 DE L'AN 10.000

LE JOURNAL

numéro 6 - mai 2005

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Art contemporain,
chroniques ordinaires

Voici les extraits d'un article rédigé par Françoise Monnin , que j'ai lu dans ARTENSION N°23, de mai-juin 2005, revue bi-mensuelle spécialisée dans l'art contemporain
Danielle Navarre


« AU SECOURS, LE CACA REVIENT ! »


« De Bordeaux à Lyon, on s'arrache la Machine à merde … (actuellement présentée au Musée des Beaux-Arts de Bruxelles)…

L'œuvre ... est constituée d'un assemblage de machines électriques reproduisant les effets de l'appareil digestif humain. On charge des aliments à l'arrière du dispositif et après quelques instants de grosses crottes tombent à l'avant, sur un plateau…. Dans la salle voisine, le musée présente une installation de Richard Jackson, constituée de gros nounours en matière plastique pissant de la peinture dans des urinoirs…

Et le monde de l'art officiel de s'émerveiller de l'audace de ces créateurs ! Est-il utile de rappeler à ce petit monde qu'en 1917 Marcel Duchamp avait dit une fois pour toutes " Merde à l'art ", en exposant un urinoir ?...

Que cinq cents personnalités influentes du monde de l'art britannique, réunies en décembre dernier à la demande des organisateurs du fameux Turner Prize, aient élu l'urinoir de Duchamp " œuvre d'art la plus influente du XXè siècle, soit ? Mais faut-il rappeler le contexte de la première guerre mondiale et l'état décadent des académies des beaux-arts alors ? A présent la pratique artistique est libre en occident et des milliers de créateurs imaginent quotidiennement des œuvres formidables. La génération de Manzoni et celle de Gasiorowski ont parachevé l'émancipation. Les pipicateurs d'aujourd'hui ont un siècle de retard dans l'imagination et l'âge mental des visiteurs de l'exposition Cradologie. Le Centre Pompidou et certains magazines défendent de tels artistes ? C'est leur choix. Ce n'est pas celui de beaucoup d'autres amateurs et amoureux d'art, qui ont eux aussi le droit de défendre ce qu'ils aiment. »

© Françoise Monnin

site d'artension : http://www.artension.fr/

 

L'AFFAIRE PINAULT ET LE CLASSICISME FRANCAIS

Le classicisme français a encore frappé.

La toute dernière affaire concernant le projet de l'homme d'affaires François Pinault qui a laissé tomber son projet d'ouvrir un grand centre d'art contemporain avec galeries et ateliers d'artistes sur l'île Seguin, dans les anciennes usines Renault de Boulogne-Billancourt , confirme l'incapacité française à garder ses mécènes et donc ses œuvres.

Ce musée devait être l'équivalent du Centre Pompidou mais dans le domaine privé. Fondation entièrement financée par l'homme d'affaires, ce dernier souhaitait en faire aussi un lieu d'échanges et de rencontres pour les artistes contemporains. Apportant les finances, les œuvres, les idées, on a du mal à comprendre comment le projet n'a pas pu aboutir.

En effet, devant les retards, le manque de facilité, les contrariétés administratives, après cinq années, le plus grand collectionneur d'art contemporain en France a décidé de renoncer à son projet. Il devrait réaliser son projet en Italie et son immense collection de 2500 œuvres contemporaines (peintures, sculptures, photographies, vidéos, ...) devrait rejoindre le Palais Grassi à Venise (en partie car la Palais est trop petit !).

Pourtant tout était prêt et c'est en 2000 que le milliardaire français avait, pour la première fois, parlé de son projet et indiqué que l'ouverture se ferait en 2005. Les usines Renault avaient fermé en 1989, plusieurs projets avaient été envisagés et la Fondation Pinault devait occuper trois des onze hectares de l'île Seguin.

D'après les informations, il ne s'agirait pas d'un caprice de milliardaire mais bien du résultat de la lourdeur administrative française et du manque total de prise de risque par ses élites.

Pour reprendre les propos du commissaire priseur Pierre Cornette de St Cyr et de François Bousteau (1), ce conflit est le reflet d'une véritable opposition entre une France passive, lente, représentée par des élites qui méprisent la création contemporaine au profit du patrimoine national historicisé. La France a disparu de la scène internationale car le pays pratique un art d'état. La prise de risques n'est absolument pas pratiquée en France et cela est dommageable à la promotion des créateurs français car il s'agirait bien de promouvoir et non pas uniquement de les défendre éventuellement. Les Etats-Unis pratiquent une politique extrêmement protectionniste envers ses artistes et cela peut aller jusqu'au rejet des créateurs européens et tout spécialement français. Plus que jamais, la situation du créateur français, comme celui des chercheurs et autres innovateurs, serait proprement intenable.

Il est heureux que certains dénoncent ouvertement le protectionnisme des Etats-Unis et la frilosité française qui lui répond comme en écho. Il est heureux qu'ils dénoncent publiquement que rien ne se fait en marge de la politique, que nous sommes les seuls à ne pas promouvoir nos artistes et que nos élites ne prennent à ce niveau aucun risque, choisissant la sécurité, c'est-à-dire les valeurs sûres. Toutes ces déclarations sont les bienvenues mais pourquoi donc constatons-nous que ces déclarations ne sont suivies d'aucun effet ?

L'exemple suivant va nous aider à comprendre. Il y a quelques mois, j'ai proposé à l'étude Cornette de St Cyr une peinture rectoversée pour sa vente aux enchères de décembre 2003. Arnaud Cornette de St Cyr (fils de Pierre Cornette de St Cyr) m'a répondu ceci :
" Monsieur,
Nous avons bien reçu votre courrier et nous vous en remercions. L'œuvre que vous nous présentez témoigne d'une œuvre personnelle et originale mais il n'a malheureusement pas été possible de l'inclure dans notre vente du 18 décembre dernier.
En effet, le marché actuel des ventes aux enchères ne se prête pas à la présentation de ces œuvres. En cette période de sortie de crise, l'intérêt des acheteurs de Drouot ne se porte que sur les artistes dont les côtes sont très établies. Ceci n'est qu'un phénomène de marché et aucunement un jugement sur votre travail…
"

Ainsi, il y a le discours d'un côté et la réalité de l'autre. Même ceux qui dénoncent avec le plus d'acuité les règles du marché semblent de toute façon s'y plier et se conformer à ces règles lorsqu'il s'agit de la prise de décision. En fait, l'élément unficateur reste la valeur marchande de l'œuvre, que l'on soit dans le domaine public ou privé.

En définissant l'œuvre par sa valeur marchande, on considère comme secondaires ses autres valeurs. Comme ces autres valeurs - qualités artistiques, émotives, intellectuelles, etc... - sont souvent subjectives, l'élément unificateur reste le "combien ça coûte?". Si ça coute cher, l'œuvre est valable, un point c'est tout. La valeur marchande s'est substituée à la valeur tout court. C'est cela la victoire profonde du matérialisme. Tout a un prix et ce qui rapporte gros est vénéré et sacralisé.


© Michel De Caso

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(1) Emission " Arrêt sur Infos ", Laurent Bazin, Europe 1, mardi 10 mai 05, avec
Pierre Cornette de St Cyr et Fabrice Bousteau, directeur de la revue Beaux Arts Magazine



PRESQUE TOUT SE VEND ..., A NEW YORK

L'art contemporain se vend mal en France. Comme pour enfoncer le clou et répondre en écho à l'affaire Pinault, New York continue de régner en maître sur le marché de l'art contemporain. Pour preuve, ce récent article révélateur de l'agence Art Price. Vous noterez qu'à sa lecture, presque tout se vend certes, mais à New York, pas à Paris!
(MDC)


« Ventes record d´art contemporain à New York »
[mai 05]

« A New York, Christie's, Sotheby's et Phillips de Pury, les trois maisons de ventes leader du marché, vont présenter à elles seules 1209 œuvres d´art contemporain en 4 jours, du 10 au 13 mai 2005.

61 d´entre elles ont des estimations hautes supérieures ou égales à un million de dollars. Durant les mêmes ventes thématiques, seuls 41 lots pouvaient y prétendre l´an dernier et tout juste 14 en 2000. A l´époque, 11 d´entre eux avaient atteint ce seuil après le feu des enchères. Sur les 731 lots proposés, 234 avaient été ravalés, soit un taux d´invendus de 24,2%. Devant une demande de plus en plus pressente, presque tout se vend désormais. En mai 2004, seuls 13,6% des 937 lots d´art contemporain n´avaient pas trouvé preneur. De 112 811 $ en mai 2000, le prix unitaire moyen des œuvres d´art contemporain échangées chez Christie´s, Sotheby´s et Phillips est passé à 227 372 $ l´an dernier, soit un doublement de la valeur du panier moyen en 4 ans.

Cet engouement s´accompagne de surcroît par une accélération de la hausse des prix. Depuis mai 2000, d´après l´Artprice Index calculé selon la méthode des ventes répétées, les prix des tableaux des artistes nés après 1940 ont crû de 58,1%. Ceux des tableaux des artistes nés entre 1910 et 1930 a même explosé : +85,6% sur cette période. Cette progression de l´indice des prix ne justifie pas à elle seule celle de la valeur des œuvres échangées.

La hausse du prix moyen et du chiffre d´affaires générés durant les ventes d´art contemporain est aussi le fruit d´une élévation de la qualité des œuvres proposées. Certes, en tête d´affiche, on trouve d´avantage de pièces de jeunes artistes habitués aux enchères millionnaires telles que Mark ROTHKO, Maurizio CATTELAN ou Damien HIRST, dont la cote a progressé de 530% depuis 1997 !

Mais les enchères le plus importantes viendront une fois de plus de la section après-guerre. Plus spéculative que jamais, ce segment fait un retour en force cette année : des pièces exceptionnelles de Mark ROTHKO et Willem KOONING de pouvant dépasser les 10 millions de $ sont particulièrement attendues chez Christie´s. Le niveau des prix atteint sur ce segment n´est plus que de 11% inférieur à celui de mai 1990. Avec une telle cotation, l´offre est logiquement abondante et les estimations plutôt optimistes.

Toutefois une question peut désormais se poser : le marché pourrait-il réellement digérer autant d´œuvres d´un coup ?
»

Source © Artprice.com
Agence de presse Artprice
http://web.artprice.com/

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