RECTOVERSION, AN 10 DE L'AN 10.000

LE JOURNAL

numéro 6 - mai 2005

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Peinture rectoversée
peinture ou sculpture ?
par Fabrice Bianchi

La sculpture nous met en mouvement alors que la peinture monoface nous immobilise; l'une nous laisse en contact avec la matière et l'espace réels, l'autre nous renvoie davantage à l'image et au miroir, à l'espace intérieur, me semble-t-il.

Une sculpture qui, en général, est orientée spatialement, peut ne pas l'être si l'artiste fait le choix de n'identifier aucun "devant" et aucun "arrière" : dans ce cas il appartient au "regardant" d'élire une orientation en synthèse de l'interprétation qu'il fera des différentes facettes de l'œuvre. Sur ces aspects de mise en mouvement et d'une synthèse toujours à faire par l'intéressé de ces multiples visions, la sculpture et la "Rectoversion" peuvent remplir la même fonction.

Par contre des différences apparaissent à l'observation dans nos réactions de "regardant".

La "Rectoversion" met en présence deux surfaces planes liées dos à dos, avec ce que cela implique dans nos structurations mentales : envers/endroit, vu/caché, conscient/ inconscient, etc...

La sculpture, quand nous en regardons une face, celle-ci nous réfère d'emblée à l'œuvre qui ne peut se dérober par sa matérialité même, par ailleurs nous savons que nous ne voyons pas tout de cette oeuvre : nous l'explorerons dans un mouvement graduel, découvrant les différentes facettes qui ne sont pas en opposition mais en continuité.

Face à un œuvre "rectoversée", le "regardant", tant qu'il ignore le concept de "Rectoversion", a l'impression que tout ce qu'il y a à voir, est là, comme dans une œuvre monoface. Une fois averti, comme face à une sculpture, il saura qu'il y a autre chose à voir. Comme dans la sculpture, il y aura attente de ce qu'il y a à découvrir; mais dans la sculpture il n'y aura pas de surprise réelle mais découverte graduelle d'un même objet dans l'évidence de sa matérialité. Face à l'œuvre "rectoversée", le "regardant" charge sa première réaction interprétative et, invité par les percées et la disposition spatiale du support, il se met en mouvement. Ce mouvement ne sera pas continu mais opérera une rupture pour aboutir à un retournement vers l'autre face : au moment du passage il n'est plus que dans la relation physique au support, et garde la relation à l'œuvre mentalement marqué de ce saut vers l'inconnu. Il débarquera imprégné de sa première vision interprétative qu'il faudra faire cohabiter avec ce qu'il découvre; il deviendra acteur du sens qu'il donnera à l'œuvre.

La "Rectoversion" me semble, en conséquence, un véhicule idéal pour interroger la dualité et offre à l'artiste de multiples ouvertures pour amener le "regardant" à s'interroger sur la mise en jeu des contraires et leur dépassement ; la sculpture ne peut atteindre cette objectif, la "Rectoversion" le peut parce qu'elle permet la confrontation dialectique d'images mentales, par le fait qu'elle s'inscrit dans l'univers de la peinture.

© Fabrice Bianchi

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