Le Métadualisme
par
Alexandre L'Hôpital-Navarre

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Sommaire du dossier

I/ LA DUALITE
1. "Ce qui est double en soi"
2. Trois en un, un en trois
3. Une double dualité
II/ LE DUALISME
1. La perte du lien
2. La confusion
3. La perte du principe
III/ LE MONISME DUALISTE
1. Contre solution et pseudo solution
2. Attraction/Répulsion
3. Messianisme et nihilisme
IV/ L'ORIGINE DE LA DUALITE
1. La pensée
2. "Un roseau qui pense"
3. Abstraction
V/ LE METADUALISME: LA "VOIE SANS CHEMIN"
1. Embrasser
2. Dépasser
3. Le principe zéro
4. Matérialisme et spiritualisme
5. "Ne demeurer sur rien"
6. La méthode
7. L'état d'esprit
VI/ ANNEXE (schémas)

I / LA DUALITÉ


1. « Ce qui est double en soi »

« Dualité » vient du latin dualis qui signifie « composé de deux ». Elle exprime le caractère ou l’état de ce qui est double en soi, de ce qui comporte la coexistence de deux éléments de nature et de fonction différentes.

De prime abord, il s’agit d’un constat dénué de tout jugement moral, un examen analytique à la fois subjectif et objectif. Nous respirons, et notre respiration est constituée d’une alternance d’inspirations et d’expirations. Il n’est pas nécessaire, dans la vie courante, de se rendre compte et de rendre compte que nous respirons, et encore moins que cette respiration contient à chaque instant une inspiration et une expiration. Si nous effectuons ce constat, c’est parce qu’il est dans la nature humaine de se représenter le fonctionnement fondamentalement dual de l’existence à seule fin de pouvoir interagir sur cette existence, de pouvoir la transformer en retour et à dessein.

En considérant plus généralement l’ensemble de la manifestation telle qu’il nous est permis de l’appréhender, on constate alors à fortiori que cette dualité fondamentale qui réside en elle prend symboliquement le double aspect de cette respiration physique, double aspect par ailleurs analogue à celui du battement cardiaque (systole/diastole).

Ainsi, l’existence toute entière comporte une phase ou un caractère à la fois centripète ; celui de l’inspiration, qui correspond à la résorption d’un phénomène en son principe, et à la fois une phase ou un caractère centrifuge ; celui de l’expiration, qui correspond à l’expansion du phénomène loin de ce principe.

On associe universellement cette double fonction, cette double nature au « caractère masculin », pour exprimer le « non », l’interdit, le statique, le droit, la limitation, la distinction, le définitif, la détermination, le descendant, l’inhibition, …etc ; et au « caractère féminin » pour exprimer le « oui », la permission, le dynamique, le courbe, le débordement, l’identification, l’indéfini, la transformation, l’ascendant, l’exhibition… etc.

 

2. Trois en un, un en trois

La manifestation, toute manifestation peut être donc qualifiée de « principe unique dans son essence et double dans sa manifestation ». L’inspiration et l’expiration ne sont « deux » qu’en apparence. La respiration est « une » qu’en apparence. L’alternance de l’inspiration/expiration émane de la respiration qui, pour virtuelle, essentielle ou informelle qu’elle soit, ne devient tangible que par la « manifestation formelle» de cette inspiration/expiration.

Mais la manifestation de l’inspiration/expiration induit de facto le principe de respiration comme essence, potentialité. « Manifestation bipolaire » et « essence unique » d’un principe sont également inséparables : pas de respiration sans inspiration/expiration ; pas d’inspiration/expiration sans respiration.

Le principe de la respiration est donc « une » entité « trois » où 1=3 et 3=1, selon la figure du triangle isocèle dont les trois côtés équidistants, alignant leurs sommets sur un cercle sans début ni fin, donc à la fois dynamique et statique, en laissent deviner le centre virtuel comme image du moyeux ou du principe qu’ils expriment (voir annexe schéma 1).

Par « essence de la respiration » (du verbe « être »), il faut entendre que la respiration EST alternance d’inspirations/expirations. Nous sommes ici dans le domaine de la manifestation instantanée, informelle, subtile, transcendantale de l’enstase (ce qui se tient en soi, ce qui nous apparaît de l’intérieur).

Par « substance de la respiration » (ce qui se tient « en deçà » de l’être d’une chose), il faut entendre que l’inspiration/expiration sont les bases ou les supports binaires et sensitifs de la manifestation de cette essence. Nous sommes ici dans le domaine de la manifestation successive, formelle, tangible, immanente de l’extase (ce qui nous apparaît à et de l’extérieur). Qu’ils soient informels ou formels, ces deux domaines participent toujours, contrairement à leur principe commun, que nous explorerons plus bas, de la manifestation.

 

3. Une double dualité

C’est que l’aspect dual d’une chose ne nous apparaît comme tel qu’à partir du moment où celle-ci s’inscrit et où on l’envisage en tant que manifestée, c'est-à-dire conditionnée dans un rapport causal, linéaire et chronologique. L’inspiration et l’expiration se manifestent comme un avant et un après interdéterminant d’un point de vue horizontal, sensitif, tandis que la respiration se manifeste comme une permanence verticale, instantanée, essentielle à cette manifestation. Mais cette permanence ne peut se révéler que par cette manifestation duale évoluant sous le signe de l’alternance et de l’impermanence.

Donc, dans tout principe, on constate la coprésence de deux rapports duaux selon deux niveaux, deux axes de réflexions concomitants. Le premier niveau horizontal ou chronologique envisage l’interaction dynamique entre ses deux pôles substantiels ; l’inspiration/expiration. Le deuxième niveau vertical, instantané ou simultané envisage l’ensemble de cette dyade substantielle en rapport à sa potentialité essentielle de manifestation ; la respiration en tant que possibilité.

On retrouve ce double constat dans le symbole universel de la croix qui représente simplement et éminemment l’union des contraires. Les deux traits qui la constituent horizontalement et verticalement rappèlent respectivement ce niveau chronologique et ce niveau instantané qui convergent et émanent à la fois vers et à partir d’un point incarnant le principe. Chaque culture illustrera ce symbole avec ses tendances et ses particularités (voir annexe schéma 2).

Au demeurant, il convient avant d’aller plus loin de bien considérer que pour fondamentale, indubitable et inévitable que soit la dualité, même envisagée selon ces deux axes, celle-ci n’en demeure pas moins relative et contingente, puisque circonstancielle et circonstanciée à la manifestation, qu’elle soit formelle ou informelle. Mais reste à définir en quoi est-elle autant fondamentale à la manifestation qu’à l’Homme, et c’est ce que nous proposerons d’aborder ultérieurement.

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